Biographie de Marie Denis

Démarche

Métabolisme : (ensemble des échanges qui s’accomplissent dans l’organisme - et pour moi, autour de nous) et métamorphose (changements de forme ou de structure, qui surviennent pendant la vie de certains animaux (j’aime à croire que pour les lieux c’est aussi vrai).

Ce qui m’intéresse est une alchimie du point de vue. Ce que le regard découvre et la pensée filtre. Ce que j’observe, je le transforme. Le quotidien, la promenade comme métronome pulsatif (comme un flux sanguin) d’idées. Comment apparaît une « idée » artistique ? Ce n’est pas un flash métaphysique, un coup de tonnerre tombant du ciel, et pourtant c’est souvent foudroyant : une idée arrive d’un ensemble de chaînons d’impressions qui alimente un courant, qui va se cristalliser et devenir l’œuvre : c’est l’histoire du mille-feuille qui d’être stratifié prend toute sa saveur.

L’art d’aujourd’hui naît des impressions, perceptions de l’artiste et de ses mouvements (les jambes et la tête, le quotidien + l’inattendu + les réminiscences de l’enfance). C’est ce qui caractérise ma sensibilité et le type de regard que je porte sur la nature et les lieux que je traverse.

Pourquoi la nature ? Le land Art m’a beaucoup marquée, il est une référence de ces 40 dernières années, l’artiste prenant le paysage comme atelier, et Robert Smithson poussant à son paroxysme, son amour des sciences et de la géologie pour en faire une mythologie personnelle, se répercutant dans ses œuvres à l’échelle du paysage.

J’aime que le végétal ou les éléments naturels se déploient dans leur propriété et leur caractéristiques : telle ou telle variété de plantes, qui par sa particularité permet un prolongement qui renforce et extrapole son existence, sa réalité. (Exemple la Licuala aux feuilles cannelées que j’habille d’un cache-pot géant en affinité avec le plissé de ses feuilles. Ou bien l’Aucuba Japonica, dont le feuillage panaché de jaune semble proliférer aux alentours par de la peinture que je répands). Le spectateur se trouve alors face à une proposition qui donne un point de vue particulier et propose d’élargir sa perception. C’est le principe du glutamate qui est exhausteur de goût. Les caractéristiques des lieux, métamorphose et métaphore.

Métamorphose : transcender un lieu, écouter ses réminiscences et ce qui le définit pour lui donner une existence amplifiée par l’idée. C’est aussi par le truchement d’objets, que je crée des signes dans le paysage. Le principe de fertilisation avec de la farine (qui est un engrais naturel, puisqu’elle contient de l’azote) donc de trace fertilisante que j’inscris dans l’espace public ou dans le paysage) ou de pochoirs que j’installe dans des jardins, qui en obstruant la photosynthèse créaient des zones de blanchiment de l’herbe. Métaphore / transport d’images. Ce qui incarne un lieu à travers des signes et le mythifie.

Dans mon site Internet, vous pourrez découvrir aussi « Aéroneige », une vidéo de 3mn30 en boucle, autour de l’architecture de l’aérotrain d’Orléans (rampe de béton de 40 Kms qui accueillait les essais d’un train à propulsion grande vitesse dans les années 60). Il s’agit d’une météorologie particulière qui arrive sur l’aérotrain : de la « neige cathodique » (celle des anciennes télé, qui apparaissait à la fin des programmes) tombe sur l’architecture de béton de l’aérotrain et finit par le recouvrir et le faire disparaître. C’est une météorologie totalement fabriquée, sur le principe des phénomènes naturels qui produisent ordre et désordre dans le monde. Cette recherche est une poétique du phénomène (météo).

Egalement un ensemble de projets réalisés au Centre Culturel de Phnom Pehn, en septembre 2005.

Le Cambodge me fait penser à un vélo, qui aurait beaucoup plus de vitesse qu’ailleurs. C’est un véritable démultiplicateur d’impressions, un bain exponentiel d’idées qui prennent leur élan dans la virtuosité des savoir-faire. Je suis arrivée sans idée préalable, pour être gagnée par une intensité d’impressions et d’urgence. Après trois semaines entre le reste du Cambodge et Phnom Penh, j’ai beaucoup de plaisir à vous présenter entre autre « Les vagues granito » (un ensemble de banc en granito réunis en un bel effet de vague) et « Mademoiselle Choura » (une multitude de sacs plastiques de différentes couleurs fixés ensemble, devenant un sac géant, grâce aux doigts de fées de Mademoiselle Choura).

Marie Denis